La photo numérique en mode manuel
(avec un réflex de préférence…)
Patrice FOIN
Remarque essentielle :
En écrivant ce qui va suivre, j’ai essayé de comprendre pourquoi diverses personnes que je connais ont des difficultés pour travailler en mode manuel en numérique ou hésitent à le faire et m’ont parfois sollicité pour que je leur montre ou que j’écrive le présent document. Je suis arrivé à la conclusion qu’il n’y a absolument aucune difficulté technique du moment qu’on connaît suffisamment le maniement de son boîtier (et, éventuellement, qu’on a surmonté le (petit) blocage psychologique qu’on a lorsqu’il s’agit de tourner des petits boutons qu’on ne connaît pas trop dans tous les sens et de revenir ensuite au réglage initial…).
Je vous livre donc une petite liste de ce qu’il y a à connaître avant de lire ce qui va suivre :
-quels sont les divers modes disponibles : automatique avancé, priorité vitesse, priorité ouverture, entièrement manuel ;
-comment règle-t-on la sensibilité, la vitesse et l’ouverture dans ces divers modes pour ceux de ces réglages qui ne sont alors plus automatiques ;
-qu’indiquent tous les éléments que l’on voit dans le viseur en dehors du sujet proprement dit ?
-comment choisir le mode de mesure de la luminosité ;
-comment débrayer l’autofocus et faire un réglage de distance ou comment choisir sur quel capteur ou ensemble de capteurs celui-ci travaille quand il n’est pas débrayé.
A mon avis, il n’est pas vraiment utile que vous essayiez de travailler en mode manuel si vous n’avez pas déjà assimilé cela… et les constructeurs de boîtiers se sont donnés la peine d’écrire des notices très détaillées bien meilleures que tout ce que je pourrais écrire sur le sujet… Tellement détaillées même que je vous suggère de chercher juste les rubriques que je cite ci-dessus, c’est déjà pas mal !
1.Qu’est-ce
que le mode manuel ?
Monsieur de Lapalisse aurait dit : « Ce qui n’est pas automatique… ». N’importe quel photographe ayant fait de la photographie en argentique ajouterait : « Ce qu’on a toujours fait avant d’avoir des électroniques-super-automatiques… ».
Donc, qu’est-ce qui est automatique et dont nous avons pris l’habitude avec les boîtiers réflex (ou non…) numériques ?
-les réglages de vitesse et d’ouverture (ils peuvent être plus ou moins automatiques : totalement ou avec une priorité à l’un d’entre eux, priorité vitesse ou priorité ouverture ; dans les modes tout automatiques élémentaires, c’est même le boîtier qui détermine la sensibilité) ;
-l’autofocus.
Le but n’est pas de frimer, du genre : « Moi, je suis très fort, je n’utilise pas les automatismes de mon boîtier et je fais tout en mode manuel !!!... ». Les automatismes sont bien pratiques et je ne vois pas pourquoi l’on s’en priverait. Cela relèverait à mon avis d’un snobisme gratuit et déplacé… mais chacun ses goûts…Seulement, il existe de nombreux cas où ils sont défaillants ou peu satisfaisants et où l’on est alors bien forcé de régler son boîtier soi-même, donc en mode manuel.
2.Photographier
en mode manuel
Mettons la charrue avant les bœufs !!!
Pour ne pas rebuter les lecteurs qui veulent passer tout de suite en mode manuel, je commencerai par expliquer comment procéder. Ensuite seulement, j’indiquerai des cas où l’on est bien obligé de procéder en mode manuel.
N’ayant aucune connaissance en matière de photo en studio, je précise d’emblée que ce que j’indique ici ne préjuge pas de l’application possible dans ce cas. De même, je ne parlerai pas des cellules électromagnétiques « à main » qui me semblent totalement superflues dans les autres types de photo (y compris, je le précise, en ultra-macrophotographie que je pratique depuis des décennies sans jamais m’être doté d’une cellule séparée du boîtier…).
Photographier en mode manuel est extrêmement simple ! Les boîtiers réflex (et même beaucoup d’autres) ont une position « M », ou l’équivalent, qui permet de régler soi-même la vitesse, l’ouverture et la sensibilité. Donc « il n’y a plus qu’à » introduire les bons réglages et à prendre la photo… Encore faut-il les déterminer !
Pour ce qui est du mode manuel pour le réglage de la distance, c’est-à-dire autofocus débrayé. Il « suffit » de régler la bague correspondante de l’objectif de façon à avoir le plan de netteté sur le sujet… mais encore faut-il y arriver !
2.1.Régler sensibilité, vitesse et
ouverture manuellement.
A vous de lire la notice de votre appareil pour savoir où se trouvent ces 3 réglages. Comme c’est variable suivant les boîtiers, je ne me lancerai pas ici dans une longue digression. J’ai pourtant le sentiment que les personnes que je connais qui rechignent à utiliser le mode manuel sont souvent des personnes qui n’ont pas assez « potassé » le mode d’emploi de leur matériel… Il faut impérativement savoir où se trouvent ces réglages et les maîtriser suffisamment pour ne pas avoir à tâtonner au moment où le sujet est devant l’objectif. C’est là le point essentiel et je ne peux pas le faire à votre place !!!...
Il faut ensuite connaître les conséquences de ses actes… Une vitesse plus grande évite des flous de bougé, une ouverture plus grande diminue la profondeur de champ, une sensibilité plus grande permet de pallier un manque de lumière… mais entraîne souvent des images plus bruitées… et inversement. Il faut trouver la combinaison des trois qui permet d’avoir la photo ni surexposée, ni sous-exposée, avec les parties nettes et les parties floues là où on les souhaite… J’ai expliqué tout ceci, exemples à l’appui, dans la rubrique « quelques bases sur les réglages » du présent site Internet et n’y reviendrai donc pas.
En un mot, il faut maîtriser la technique de la photographie ! Est-ce étonnant ? Ça ne l’est pas mais le devient pour tous ceux qui, ayant acheté un matériel cher et n’ayant jamais fait de photo en numérique, attendent de lui qu’il sache tout à leur place…, qu’il n’y ait qu’à « appuyer sur le bouton »… Vous pouvez toujours acheter une voiture à plusieurs millions d’euros, avoir tous les GPS du monde, avoir toute l’électronique que vous pouvez imaginer, ça n’est pas elle qui vous dira où vous voulez aller ! Pourquoi voudriez-vous que votre matériel photo décide à votre place comment il cadre, où il doit y avoir du flou et tout ce qui fait une bonne (ou une mauvaise…) photo ? Il n’y a aucun doute qu’avec les matériels modernes, vous arriverez à faire des photos en appuyant sur le bouton. Vous y arriverez même avec un téléphone ou une tablette si vous ne pinaillez pas trop la qualité…Vous aurez même parfois d’excellentes photos si vous avez un certain sens artistique… mais quand vous avez besoin de passer en mode manuel, et bon nombre de types de photo l’exigent, vous passez à la vitesse supérieure, et vous ne pouvez le faire sans connaître ces quelques éléments.
Je vais maintenant donner quelques moyens simples de faire les réglages en mode manuel… à la condition expresse que vous connaissiez ce que j’évoque dans les quelques paragraphes précédents. Sinon, précipitez-vous d’abord sur le mode d’emploi de votre matériel et regardez ensuite ma rubrique « quelques bases sur les réglages », ou tout autre manuel de photographie qui vous l’expliquera parfois bien mieux que moi, quand, à l’inverse, il ne vous noiera pas sous des tonnes de considérations techniques hors de propos ou peu compréhensibles, ce qui arrive aussi…
Regardez dans votre viseur. Vous voyez le sujet que vous allez prendre, cela va de soi… Mais vous y voyez aussi diverses choses sous une forme variable suivant les boîtiers, mais qui indiquent toujours en gros la même chose, vitesse, ouverture, sensibilité,… Et vous avez en général un petit affichage qui ressemble à celui-ci-dessous (issu de mon boîtier CANON mais c’est à peu près la même chose pour les autres marques, d’après ce que j’ai vérifié par sondage sur quelques exemples).
Dans les modes automatiques, contrairement à l’exemple ci-dessus, le petit curseur est en principe en face du zéro ce qui indique que l’exposition est correcte, à quelques réserves près. Je ne parle ici que des modes automatiques un peu avancés :
-le mode « P » (de CANON et d’autres constructeurs) est un mode automatique avancé qui vous laisse une certaine latitude comme on le verra plus loin ; il ne va pas vous changer la sensibilité ou vous sortir le flash de manière impromptue ; ceci veut donc dire que de toute façon, vous avez à régler la sensibilité préalablement ;
-le mode priorité ouverture (« Av » de CANON) se débrouille en général pour vous trouver une vitesse qui marche pour la lumière que vous avez ; en effet, les boîtiers actuels offrent une gamme de vitesses très étendue… mais c’est un piège ! En effet, regardez bien la vitesse qui s’affiche ; si elle est trop lente, vous avez toutes les chances d’avoir du flou ; pour un sujet statique, au dessus du 1/30 de seconde ou un peu plus (1/15 peut-être), vous risquez un flou de bougé si vous n’êtes pas sur pied ou parfaitement calé ; le stabilisateur de l’objectif, s’il y en a un, peut vous aider… mais n’en attendez quand même pas des miracles ! Si le sujet est mobile, il vous faut une vitesse adaptée ; regardez ma rubrique « quelques bases sur les réglages » si vous voulez une idée de ce qui est nécessaire dans divers cas ; mais de toute façon, le mode priorité ouverture n’est en général pas adapté dans ce cas ;
-le mode priorité vitesse (« Tv » de CANON), mieux adapté pour les sujets qui bougent, vous indiquera d’une manière ou d’une autre s’il n’y a pas assez de lumière (ou trop mais c’est beaucoup plus rare), par exemple, sur certains boîtiers, avec la valeur de l’ouverture qui est au minimum de ce que permet l’objectif et qui clignote.
Dans tous ces cas, le curseur indiqué ci-dessus reste centré sur la graduation et il doit l’être, sauf choix délibéré de votre part comme je vais l’expliquer. D’une manière générale, si vous n’êtes pas satisfaits de votre photo à ce stade, il vous reste quelques échappatoires avant de passer en mode tout manuel :
-jouer sur la sensibilité que vous devez de toute façon choisir ; mais attention au bruit si vous forcez trop celle-ci, surtout dans un environnement obscur (intérieur de monument par exemple) ; 400 ISO est une valeur bâtarde que je privilégie mais si vous voulez un minimum de bruit quitte à faire de longues poses, choisissez une valeur plus faible ; inversement, si vous êtes « à court » de lumière, vous pouvez augmenter mais à vous de vous faire une opinion sur le bruit induit au fil des photos que vous prendrez ;
-commencer à vous préoccuper du mode de mesure de la luminosité que vous utilisez (si vous ne l’avez pas déjà fait, vous auriez peut-être dû commencer par là avant de prendre des photos hors mode tout automatique…) ; si vous tenez à bien maîtriser ce que vous faites, je vous conseille de prendre la mesure sur le spot central et de regarder ce que cela donne : vous allez en avoir besoin en mode manuel ; quand vous baladerez votre centre de viseur sur la scène que vous avez devant vous, vous pourrez observer les changements de réglages que l’appareil vous indique ; de là à en déduire les valeurs que vous mettrez en mode manuel, il n’y a qu’un pas que nous allons franchir dans quelques lignes !
-jouer sur ce fameux curseur ; sur la plupart des boîtiers, il est possible de forcer la luminosité ou au contraire de la réduire par rapport aux valeurs données par les automatismes ; il est ainsi possible de fausser les réglages automatiques d’un ou quelques diaphragmes… et de suivre ce qui se passe sur le curseur ; mais attention, le plus souvent, une fois le réglage correspondant effectué, celui-ci restera opérant jusqu’à ce qu’on l’ait annulé ; le risque est donc d’obtenir une très bonne photo… puis de louper toutes les suivantes en ayant oublié de revenir aux réglages standards…; en plus, en mode priorité vitesse, si vous êtes déjà à l’ouverture maximale ou minimale, ça n’est pas en jouant sur ce curseur que vous changerez quelque chose…
-je ne parle pas de l’utilisation du flash qui joue sur l’équilibre de la photo en éclairant plus les premiers plans, ça n’est pas le sujet ici.
Ci-dessus,
mode manuel ou pas, vous pourrez toujours vous débattre avec les réglages, soit
les vitraux seront surexposés et vous ne verrez pas ce qu’ils représentent,
soit les piliers seront sous-exposés et tous noirs. Le remède est un coup de
flash bien dosé… ; comme les églises existent depuis des siècles et ont
des chances de continuer à exister longtemps… ça vous donne tout votre temps
pour procéder par essais et erreurs jusqu’à obtenir ce que vous
souhaitez ; le mode priorité ouverture pourrait être le plus adapté mais
je ne me souviens plus de ce que j’avais choisi ; à propos de cette photo,
j’ai même trouvé un contradicteur qui m’a soutenu que ce serait plus joli avec
les piliers tous noirs ; après tout, pourquoi pas ? C’est affaire de
goût mais personnellement, je préfère comme ça !
Et maintenant, pour une raison quelconque qui est en général liée à votre insatisfaction à propos de la photo que vous venez de prendre, ou pire, à l’impossibilité de la prendre
VOUS
PASSEZ EN MODE MANUEL !!!
Si vous avez assimilé ce que j’ai écrit dans les lignes précédentes, les réglages tombent comme un fruit mûr !
Si vous avez suivi mes conseils dans la rubrique « quelques bases sur les réglages », vous avez déjà préréglé en mode manuel une vitesse et une ouverture. De toute façon, si vous ne l’avez pas fait, le constructeur s’en est chargé pour vous… Dans tous les cas, rien ne prouve qu’elles conviennent à votre situation présente. En général, suivant les cas, vous aurez de bonnes raisons de privilégier soit une vitesse (sujet en mouvement), soit une ouverture (choix d’une profondeur de champ).
Vous avez à combiner plusieurs manières d’agir pour déterminer vos réglages :
-si vous venez de prendre une photo qui ne vous satisfait pas, vous pouvez voir sur le boîtier quels étaient les réglages qui ont conduit à ce (mauvais) résultat (infos sur la photo que vous affichez sur l’écran LCD) ; de là, vous pouvez les faire évoluer ; un peu plus d’ouverture par ci, de vitesse par là, et vous aurez sans doute un réglage meilleur ;
-positionnez la partie centrale de votre viseur sur le sujet qui vous intéresse et regardez où se trouve le fameux curseur ; tout en visant, vous pouvez modifier vitesse, exposition, sensibilité pour qu’il arrive au centre de la graduation ; c’est là le point essentiel… pour autant que vous soyez en mode mesure de la luminosité sur le spot central ; sinon, çà ne marche pas ou c’est le grand n’importe quoi ; vous pouvez aussi comparer le cas échéant avec d’autres zones de la photo que vous comptez prendre (pour qu’elles ne soient pas trop surexposées ou sous-exposées) ;
-et de toute façon, utilisez l’écran de contrôle (écran LCD) en regardant la photo que vous venez de prendre, au besoin corrigez et recommencez ; ça s’appelle procéder par essais et erreurs, et c’est très efficace !
Et si vous avez un sujet fugace ??? Je sens venir la question ! Mon site Internet est plein d’oiseaux et de libellules en vol, d’animaux en mouvement, presque tous pris en mode manuel. Pas question d’essais et d’erreurs dans ce cas me direz vous, quand vous aurez changé les réglages, la bestiole sera partie depuis longtemps ! Et bien si ! C’est une question de patience. Pour connaître les bons réglages pour un rapace en vol, j’ai mis deux ans, pour les libellules en vol plus encore. Seulement, je n’ai pas mis tous les loupés qui ont précédé les bonnes photos sur mon site et vous ne voyez que de bons résultats…
Ci-dessus,
typiquement le sujet qui donne une ombre chinoise noire sur fond de ciel si
l’on ne maîtrise pas les réglages ; focale 400mm, ISO400, f7,1,
1/1000 ; comme par hasard, ce sont les réglages standards que je préconise
dans « quelques bases sur les réglages » ; et pour cause !
J’attendais quelqu’un debout à côté de ma voiture ; le milan royal est
arrivé sur moi sans crier gare et je n’ai eu que le temps de passer la bague de
réglage sur M et d’ajuster ; dans ces cas là, ça passe ou ça casse, et
cette fois, c’est passé (mais ça n’est pas toujours le cas, hélas…) ;
Et puis, il y a quand même un « truc »… Vous savez en général à peu près ce que vous allez rencontrer, un oiseau sur fond de ciel, ou au contraire sur fond de végétation, ou encore tout noir dans l’épaisseur du feuillage. Donc vous pouvez commencer à prendre quelques clichés sur fond de ciel ou de végétation et affiner vos réglages suivant la luminosité du jour et votre position par rapport au soleil ou à la source de lumière. Et c’est bien là l’intérêt d’avoir deux préréglages, un « à tout faire » en mode priorité vitesse et un en mode manuel. Quand le « sujet du siècle » surgit, vous avez juste à basculer d’un mode dans l’autre et vous êtes (pré-)réglés (ce qui ne vous empêche pas de contrôler ensuite sur l’écran de contrôle (LCD)). Le maître mot est « avoir de la patience » car sur ce genre de sujet, vous aurez toujours plus de loupés que de réussites… mais celles-ci sont tellement gratifiantes ! Et puis, le « pifomètre », ça s’améliore ! Quand vous aurez, comme moi, loupé beaucoup de photos… et fini par en réussir quelques-unes, vous aurez une idée approximative mais de plus en plus fine des réglages à mettre. Ça aide, même si ça n’empêche pas de se « planter » encore souvent ! Par exemple, mon « pifomètre » m’a appris que pour une mouette en vol, c’est du 1/400, pour un rapace en vol du 1/1000, pour une mésange en vol du 1/4000 ou plus.
Et je ne parle pas ici des sujets statiques, photos de nuit ou en pose par exemple. Vous avez alors tout le temps de peaufiner vos réglages jusqu’à être pleinement satisfaits et donc de faire tous les essais que vous pouvez souhaiter.
Ci-dessus,
photo au sortir du restaurant, donc je n’avais pas mon pied ni ma télécommande,
mais j’avais tout mon temps. Appareil posé sur un pavé au bord de la Creuse,
focale 17mm, f9, ISO400, pose de 6 secondes, autofocus débrayé pour corser le
tout… (et la lune n’est même pas un trucage !!!...) ; (à noter qu’il
existe dans le commerce de petites télécommandes à pile qui portent à
100mètres, sont hyper-légères et très peu chères, de l’ordre d’une cinquantaine
d’euros si ça n’a pas changé, et bien pratiques dans ce genre de situation).
(Et puis, si vous ne rêvez que de photos de famille ou de paysages, vous pouvez oublier tout ceci, revenir au mode automatique, faire les mesures de lumière et de distance sur le champ le plus grand possible, le présent article n’est pas fait pour vous…)
2.2.Débrayer l’autofocus.
Il existe des cas où vous êtes obligés de débrayer l’autofocus, tout comme il en existe où vous êtes obligés de faire les autres réglages manuellement. En général, vous avez un bouton (sur l’objectif) pour débrayer l’autofocus et une bague qui vous permet de régler à la main la distance. Après, il n’y a plus qu’à… Tout est question de coup d’œil pour voir dans le viseur si vous voyez votre sujet net. Pas très facile et l’on regrette le bon vieux télémètre à coïncidence dont était dotée l’immense majorité des boîtiers argentiques.
Là aussi, il y a quand même quelques trucs, notamment de réitérer de nombreuses fois le réglage en prenant une ou quelques photos à chaque fois, de choisir pour apprécier la netteté une partie du sujet qui est susceptible d’être très nette, par exemple un petit bout de branche au lieu de vous perdre dans le plumage d’un oiseau, etc. Cela vient avec l’expérience et les cas où l’on doit débrayer l’autofocus sont quand même beaucoup plus rares que ceux où l’on règle manuellement les autres paramètres. Avec beaucoup d’entraînement, on peut régler manuellement la distance et prendre des photos sans pied avec un 400mm doté d’un doubleur, soit 800mm de focale et un capteur APS-C (équivalent de 1280mm de focale en argentique). Ne commencez quand même pas par là, vous risquez de grosses déceptions…
Je
le prouve ! Ci-dessus, photo de chamois prise avec une focale de 800mm,
sans pied ni aucun support, autofocus inopérant avec le doubleur, f11, ISO1000,
1/640. Ci-dessous, grèbe jougris, photo prise avec une focale de 800mm, sans pied
ni aucun support, autofocus inopérant avec le doubleur, f11, ISO400, 1/800 ;
et, à propos, c’est lui qui est venu me voir et moi qui l’ai attendu
(longtemps) ; ne jamais courir après un animal, il court plus vite que
vous ! (voir « à propos du comportement dans la nature » sur le
présent site Internet) ;et s’il ne vient pas, ça n’était pas le jour mais
vous n’auriez pas fait mieux en courant après… ; ça sera mieux la
prochaine fois !
Mais attention, sur les sujets fugaces (oiseaux, photos de sport, véhicules en mouvement, etc.), si vous ne débrayez pas l’autofocus, assurez-vous qu’il opère uniquement sur le capteur central. Sinon, il va se perdre « dans la nature » et vous allez cultiver la photo floue…
2.3. et après !!!...
Après,
n’oubliez pas de réenclencher et de re-régler tous les automatismes que vous
avez modifiés. Sinon, vous risquez de multiplier les photos loupées !
3.Dans
quels cas utiliser le mode manuel ?
Les automatismes sont tellement pratiques que l’on en oublie qu’on peut s’en passer, ou que les photographes n’ayant jamais fait d’argentique peuvent aller jusqu’à ignorer qu’il y a autre chose… Et après tout, pourquoi se priver ? Bien au contraire, s’appuyer sur les automatismes permet de se concentrer sur d’autres choses : la composition du sujet, le cadrage, la lumière, etc. On peut donc faire d’excellentes photos en laissant agir tout ou partie des automatismes… jusqu’au jour où l’on atteint leur limite…
Je ne parle pas ici du mode tout automatique pour débutant qui vous règle la sensibilité et sort le flash à tout propos. Oubliez-le, il conduit généralement à beaucoup de désastres : photos bruitées, etc. Mais il existe un mode automatique « tout à fait honorable » qui vous laisse maître de la sensibilité et du flash d’appoint (le mode « P » évoqué ci-dessus). Et puis pour évoluer progressivement, il existe ensuite les modes priorités vitesse et priorité ouverture qui sont bien pratiques et vous accoutument à faire des réglages vous-mêmes. Je n’y reviens pas, j’en ai déjà parlé.
La question de passer en mode totalement manuel se pose donc à partir du moment où les automatismes ne donnent plus satisfaction. Autant dire que si l’on n’y est pas un peu préparé, de l’improvisation totale laisse vraiment très peu de chance de réussite …
Passons donc en revue des cas où l’on ne peut plus se fier aux automatismes :
-d’une manière générale, à chaque fois qu’étant en mode automatique, la photo qu’on obtient sur l’écran de contrôle n’est pas satisfaisante : sujet trop sombre, trop clair, flou, bruitée, etc. (encore que le bruit ne se voit guère sur l’écran de contrôle…) ; n’oubliez pas que si vous affichez sur votre écran LCD les infos liées à la photo et que vous êtes familiers de ce mode de représentation, un petit histogramme vous indiquera si vous étiez dans la bonne plage de luminosité ou non… mais on peut parfaitement vivre sans ;
-la photo de sujets sur fond très sombre ou au contraire très clair : en photo animalière, un oiseau en vol sur fond de ciel (fond clair) a toute les chances de fournir automatiquement… une ombre chinoise sans aucun intérêt ; inversement, un oiseau dans un arbre aura toute les chances de fournir un sujet complètement noir avec les taches de ciel complètement blanches… je prends ces exemples en photo animalière car il s’agit de mon domaine de prédilection mais tout autre sujet dans ces conditions risque de conduire aux mêmes échecs…
-la photo de nuit ; presque toujours, on essaiera d’avoir des effets de lumière et ceux-ci ne pourront le plus souvent être obtenus que par tâtonnements sur les réglages, même si la cellule de l’appareil fournit encore des éléments de réglage ; l’usage d’une cellule à main, qui ne me semble pas vraiment utile, conduit quant à lui automatiquement à des réglages manuels ; l’autofocus a alors lui aussi toutes les chances de devenir inopérant et il faudra le plus souvent régler aussi la distance manuellement en déconnectant l’autofocus ; si vous n’êtes pas en pose mais dans l’obscurité avec un flash suffisamment puissant, non seulement vous aurez à faire les réglages de vitesse et d’ouverture mais aussi de distance en débrayant l’autofocus car celui-ci risque de vous laisser en carafe… et facteur aggravant, si vous n’avez pas potassé les notices du boîtier et du flash, le premier risque de vous ramener à une vitesse égale ou inférieure à 1/250, ce qui n’est pas toujours suffisant (cas d’une longue focale sans pied par exemple) ; c’est alors de la voltige, d’autant plus qu’il vous faut quelquefois trouver les boutons des réglages à tâtons !
Ci-dessus,
photo prise en pleine obscurité depuis ma voiture sans couper le moteur (je
n’étais pas au volant…) ; sujet coopératif qui m’a laissé louper une
quinzaine de photos avant de trouver les bons réglages, sans s’envoler ! Si
j’avais fait couper le moteur, l’effraie serait partie aussitôt… ; flash
puissant mais autofocus débrayé, et pour cause, et grosses difficultés pour
juger si la photo est nette. Focale de 400mm, f6,3, 1/200, ISO640.
-la photo de sujets se déplaçant très rapidement ; les automatismes du boîtier n’auront pas le temps d’opérer ; si le sujet présente une luminosité voisine du fond, le pire n’est pas certain, mais il est quand même hasardeux de s’y fier tout le temps ; de plus, le plus souvent, c’est l’autofocus qui ne suivra pas, risquant de donner un fond net avec un sujet flou… et là, pas question de le débrayer : à vous d’acquérir le « coup de patte » qui vous permet de suivre le sujet suffisamment longtemps pour que l’autofocus opère ; et plus le sujet est loin donc paraît petit, plus l’autofocus aura du mal à l’ « accrocher »…
Ci-après,
photo de libellule en vol (aeschne mixte), mode manuel, sans pied ni aucun
support, mais autofocus non débrayé, focale de 400mm, ISO400, 1/800…
demande un certain coup de patte pour arriver à faire réagir l’autofocus au
moment où l’insecte se présente mais n’est pas si difficile que ça a l’air… Une
variante consiste à débrayer l’autofocus et « tirer sur tout ce qui
bouge » et semble passer dans le plan de netteté. C’est par là que j’ai commencé
mais finalement, je préfère me fier à l’autofocus… De toute façon, beaucoup de
loupés pour peu de réussite…
-dans
beaucoup de cas, la macrophotographie nécessitera des réglages manuels, aussi
bien de l’ouverture et de la vitesse que de la distance de prise de vue ;
il existe même des objectifs macros qui sont dépourvus d’autofocus (objectifs
pour l’ultra-macrophotographie, utilisation d’une bague d’inversion…) ;
Ci-dessus,
photo de minéral, plage photographiée 8 mm, sans recadrage ; appareil fixé
sur statif, lumière naturelle, objectif macro de focale 65mm dépourvu
d’autofocus (CANON MPE) ; f16, ISO400 ; 2,5 secondes ; j’ai
commis une erreur, j’aurais sans doute mieux fait de prendre ISO100 et une pose
de 10 secondes pour éviter du bruit mais la photo n’est de toute façon pas
vraiment bruitée et même très bonne de ce point de vue…
-bien entendu, si l’on recherche des effets spéciaux, il y a de fortes chances que les automatismes du boîtier soient insuffisants pour obtenir ce que l’on recherche ; c’est par exemple le cas avec les filtres gris ;
Ci-dessus,
photo au filtre gris (environ 9 diaphragmes) sur pied ; focale 19mm,
ISO100, f7,1, pose de 2,5 secondes.
-et j’ajouterai un cas qui n’est pas anodin ; si l’on utilise un doubleur de focale avec un objectif ayant déjà une longue focale et une ouverture assez faible, l’autofocus risque de devenir inopérant ; il faut alors régler la distance manuellement (tout en maîtrisant la lumière qui devient alors très réduite…) ; voir les exemples de photos prises dans ces conditions ci-dessus ;
-je ne parle pas de la photo de studio étant incompétent pour cela…
-le cas des contrejours est un peu spécial et ne rentre pas totalement dans le présent sujet ; en effet, les automatismes donneront souvent d’assez bons résultats, surtout si l’on joue un peu sur les décalages des réglages comme je l’ai indiqué ; ce sera souvent le premier plan qui sera trop sombre, surtout s’il s’agit du personnage principal pris à contrejour parce que le fond était joli (j’appelle ça « le syndrome de l’âne de Buridan » ; il faut savoir choisir entre deux sujets, un personnage et un paysage !) ; l’usage d’un flash d’appoint peut être la solution mais n’est pas dans le sujet.
A noter que tout ce qui est écrit précédemment ne présuppose pas que le boîtier que l’on utilise soit réflex. Beaucoup de bridges ou de compacts offrent les mêmes possibilités. Mais il n’est déjà pas toujours aisé de définir et de mettre en place les réglages en mode manuel sur un boîtier réflex, cela devient parfois une galère totale avec ceux qui ne le sont pas, quand ils offrent ce genre de possibilité… En outre, comme ils n’ont pas la gamme d’objectifs que j’évoque implicitement ci-dessus, bon nombre de cas où le mode manuel est impératif ne s’appliquent pas avec ce genre d’appareil photo.
Et puis, au risque de radoter, n’oubliez
pas de revenir aux réglages standards quand vous avez fini avec des réglages
plus ou moins « exotiques ». Sinon, vous risquez de gâcher des
séances photos entières…Notamment, embrayez à nouveau l’autofocus si vous
l’avez débrayé.